Alors que la crise sanitaire liée à la pandémie du Coronavirus semble s’atténuer et que les gouvernements des pays touchés font appel à divers spécialistes pour penser le « monde d’après », les analystes de la situation évoquent les risques politiques pouvant être causés par la crise mondiale de la covid 19 : retour à la situation antérieure de l’ultra-libéralisme, ou renforcement du nationalisme et de l’autoritarisme des états. En réalité, nous nous situons sans doute dans une 3e voie qui n’est ni la guerre au virus, ni le laisser-faire, mais qui consiste à éviter que la pandémie advienne à nouveau. La décroissance n’est pas selon nous une solution envisageable car trop idéologique. Pour nous, la question qui se pose avec cette pandémie est celle de la structuration de la société : la surdensité urbaine associée à une séparations des fonctions et des groupes sociaux entraînant des déplacements épuisants et coûteux pour la collectivité. C’est en cela que « le monde d’après » ne peut pas se contenter d’un retour en arrière, ou d’un simple rejet du monde d’aujourd’hui.
Les dégradations de l’environnement à l’origine du coronavirus
Éclosion d’un nouveau virus transmis à l’homme
Tous les virus ne sont pas néfastes : de nombreux virus existent dans le corps humain, et coexistent très bien avec l’homme, et il n’y a naturellement pas beaucoup de mouvements de virus interespèces.
Cependant ces dernières années, les virus qui parasitent les animaux sauvages sont devenus plus courants chez l’homme, et la théorie selon laquelle le coronavirus dérive cette fois également d’animaux sauvages est reconnue. Bien que des maladies émergentes dues à des virus aient régulièrement jalonné l’histoire humaine, on observe depuis quelques décennies une amplification de ces phénomènes, et ces virus causent souvent de graves dommages au corps humain comme le Sida, le SRAS, le virus Ebola ou maintenant le coronavirus.
Cela serait dû à deux causes majeures liées à la dégradation de l’environnement :
- La proximité accrue des animaux sauvages et des hommes en raison de la régression des zones naturelles sauvages et de l’extension des zones urbaines.
- La réduction de la biodiversité qui entraîne une plus grande fragilité des espèces.
Les dégradations de l’environnement ont créé cette menace pour l’homme
Les dégradations sont connues :
- Réchauffement climatique dû à l’augmentation du CO2.
- Augmentation des pollutions dues aux activités humaines.
- Instabilité de l’équilibre de l’écosystème mondial.
- La diversité biologique et végétale qui se perd.
- La destruction des zones sauvages naturelles par l’extension des zones d’activité humaine.
- Contact accru entre l’homme et la faune.
De fait, le renforcement de la biodiversité dans tous les domaines – végétal, animal mais aussi humain – ainsi que sa protection sont vitaux.
La relation qui lie santé humaine – santé animale – santé environnementale n’est pas bien comprise du public et une sensibilisation et une éducation dès le plus jeune âge s’imposent à ce sujet.
Pourquoi la pandémie mondiale s’est-elle produite ?
Les flux des biens et des personnes autour de la terre et dans les villes permettent aux virus de se propager très rapidement
La pandémie galopante est une conséquence d’une mondialisation désordonnée des échanges s’appuyant sur le transport de produits dans le monde entier pour réduire le prix des marchandises. Le développement du tourisme de masse renforce cette tendance. Le virus se déplace avec les gens : d’une part un grand nombre de personnes se déplace dans le monde et d’autre part les contacts sont rapprochés dans les grandes villes surpeuplées. Ces deux phénomènes favorisent la transmission des virus.
Il est souhaitable de limiter les déplacements et les transports au strict nécessaire
A l’échelle d’une agglomération, les transports en communs sont engorgés car les lieux de travail et de vie sont trop éloignés. Une ségrégation sociale insupportable dérive de cet état de fait. À Saint-Denis par exemple, il faudrait créer beaucoup plus d’emplois pour les nombreux habitants, alors qu’à La Défense, il serait souhaitable que les travailleurs qui entretiennent les locaux habitent à proximité, et que les personnes qui travaillent habituellement dans les bureaux exercent chez eux en télétravail les activités qui s’y prêtent.
Les trop fortes densités urbaines, en entretenant la proximité des personnes, favorisent la propagation des virus.
Les disparités économiques et sociales en augmentation fragilisent les populations les plus précaires
On observe que les personnes pauvres sont plus exposées aux virus, or la politique urbaine creuse l’écart entre riches et pauvres :
- Les environnements médiocres sont le lot des plus démunis.
- Les zones rurales sont laissées à l’abandon, sans service de santé, de transport, obligeant les habitants à choisir entre isolement ou déplacement en ville.
- De nombreux pays accordent la priorité à l’économie plutôt qu’à la santé.
- Le critère économique est privilégié par rapport au critère politique et au jugement scientifique.
La croissance exponentielle des villes (la population totale du monde était de 3 milliards en 1960, dont 30% de la population urbaine, la population totale de 7 milliards en 2017, dont 55% de la population urbaine) nécessite une remise en question de leur occupation et de leur organisation. Aujourd’hui, on ne peut que constater que les politiques urbaines n’ont pas su appréhender ces problématiques : les villes sont surpeuplées et il est facile pour les virus de se propager.
Et demain, on fait quoi pour prévenir une pandémie (et vivre mieux) ?
Un mouvement général de déconcentration urbaine et de développement de zones autonomes à différentes échelles et en lien étroit les unes avec les autres est à développer
Cette idée s’oppose à la conception actuelle du Grand Paris. Nous souhaitons le renforcement des communes, indépendamment de Paris. Chaque commune doit être capitale pour ceux qui y habitent ; c’est la bonne échelle en termes d’unité de vie. C’est peut-être ce que révèle l’engagement des citoyens pour les politiques locales (plus que pour les politiques régionales, départementales, ou européennes), ils veulent reprendre la main sur le lieu où ils vivent. Ainsi, les villes sont autant des lieux pour habiter que pour travailler : plus de commune-dortoir ! Le logement pour tous est alors le résultat de la récupération des logements vacants, de la reconversion éventuelle des bureaux inutilisés et de la construction de petits immeubles confortables et bien intégrés, pour éviter la diffusion urbaine : plus de zones pavillonnaires ! Des activités de production sont à même de se situer à cette échelle, comme l’agriculture vivrière et potagère au pourtour de la commune.
Dans cette option, chaque zone est indépendante au niveau des ressources pour assurer les besoins essentiels : habiter, manger, s’habiller, disposer de l’hygiène et aussi pour les activités telles que l’éducation, le transport, le travail, etc… L’autonomie est alors hiérarchisée à différents niveaux : échelle de l’habitation, de l’immeuble, du quartier, de la commune, du groupement de communes, du département, de la région, du pays, du groupement de pays, de l’Europe, du Monde.
De plus, aujourd’hui, les villes sont devenues plus des lieux de consommation que d’activité, cette dernière ayant été délocalisée. Nous voulons favoriser un monde basé sur la joie de créer plus qu’une joie de consommer.
Avec cette optique, l’autonomie est aussi écologique : utilisation des ressources locales, recyclages, production d’énergie, gestion des eaux, etc…
Abandonner le modèle centralisé (jacobin) pour un système maillé
Fragmenter les villes trop denses et au contraire revitaliser économiquement les zones dépeuplées sont des objectifs souhaitables. On devrait réaliser des coupures vertes au sein même des villes : espaces de respiration et barrières naturelles entre espaces fortement peuplés.
Au niveau social et économique, il est nécessaire de réduire les disparités
Nous sommes pour une économie équilibrée, au contraire de l’économie actuelle qui est basée sur l’hyperconsommation et le gâchis qui l’accompagne avec le développement d’une nourriture qui est peu coûteuse mais n’est pas bonne pour la santé par exemple. Nous souhaitons une économie qui garantirait à tous la possibilité de s’habiller, manger, se loger, avec la revalorisation de la main d’œuvre, notamment dans l’agriculture.
Au lieu de dépenser dans une « bataille » contre le coronavirus, il vaut mieux investir avant (« prévenir plutôt que guérir »).
Ce changement de paradigme induit la transformation de nos manières de vivre.
Au niveau écologique, des actions concrètes peuvent être menées, en particulier dans le domaine de la construction :
① Développement durable
Le développement durable demande soit des actions de restriction :
- éviter le gaspillage de l’eau,
- éviter le déplacement inutiles des matériaux,
- éviter le gaspillage de l’énergie,
- éviter la pollution liée à la production de déchets,
- limiter l’obsolescence des produits…
soit des actions de développement orientées dans un sens positif :
- réutiliser et recycler des matériaux et produits,
- privilégier les matériaux renouvelables comme le bois,
- utiliser au maximum ce que l’on trouve sur place,
- favoriser l’intégration environnementale et sociale…
② Développement des économies d’énergie
Dans le domaine de l’énergie, il y a deux axes principaux :
- développer les énergies renouvelables
- réduire la consommation d’énergie
Dans le domaine de la construction et de son utilisation, l’orientation actuelle va vers l’autosuffisance énergétique en augmentant les performances de l’isolation thermique, en maximisant les apports solaires et l’inertie thermique, en récupérant la chaleur produite par les habitants et les installations ménagères et en produisant l’énergie restante de manière autonome.
Parfois des solutions architecturales simples et économiques permettent un meilleur contrôle du climat dans l’architecture : par exemple protéger du froid l’hiver et éviter la climatisation l’été avec un avant-toit protégeant du soleil l’été mais laissant passer le soleil l’hiver, ou encore, mettre en œuvre un mur épais apportant de l’inertie thermique.
La végétation associée à la construction peut aussi être très bénéfique.
L’ADEME pousse à de nombreux progrès dans ce domaine, son action est à poursuivre vers l’autosuffisance et la production de chaleur décentralisée.
③ Entretien de l’environnement
Dans ce domaine il faut prêter une grande attention à tous les flux, que ce soit le flux des eaux souterraines ou les eaux de surface et leur percolation dans la terre, ou les flux d’air, ainsi qu’à la quantité d’émission de CO2. Toute la nature est liée à ces flux, à la recherche d’équilibre de vie.
④ Autres
Il s’agit ici d’une attitude générale de l’homme en société et de son attitude face à la nature.
Comment mieux habiter l’espace ? Comment concilier lieux d’habitation, de travail, d’apprentissage et de production ? Comment s’approprier les lieux de vie ? Notre démarche est toujours basée sur la recherche de lieux forts, clairement identifiés en cohabitation avec la nature.
Réalisations en éco-construction et participation avec protection de la bio-diversité ©Atelier Kaba
L’Atelier Kaba, constructeur de vie saine
Ces réflexions environnementales et sociétales sont au fondement de notre démarche. Depuis 1995, l’Atelier Kaba crée des espaces liant hommes et l’environnement.
Nous sommes pour :
- Une limitation des mégalopoles et une restructuration des villes avec :
- Un verdissement maximum
- La mixité des fonctions, le rapprochement du travail et de l’habitat
- L’autonomie et l’équilibre des unités urbaines avec des villes agréables à vivre, dans lesquelles la fabrication et la consommation d’énergie sont proches.
- La revitalisation des espaces dépeuplés
- Le développement des éco-activités et notamment dans un tourisme participatif et expérimental.
- Des logements et des espaces de bureaux repensés par rapport au télétravail
- Un développement durable des constructions et de l’aménagement du territoire
- Une éco-construction
- Une éco-gestion de l’énergie
- Un meilleur entretien des constructions et des espaces extérieurs
L’Atelier Kaba est composé d’architectes et de paysagistes qui travaillent à transformer et améliorer la vie en société à tous les niveaux, depuis l’intérieur de la maison au territoire.
L’Atelier Kaba propose une nouvelle façon d’utiliser et partager le territoire, une nouvelle relation homme-nature.
Les réalisations de l’Atelier Kaba attestent de notre engagement comme vous pourrez le constater sur notre site www.atelierkaba.fr.
Elles regroupent des constructions et aménagements utilisant le bois (économes en énergie et bien intégrés dans la nature), des aménagements extérieurs valorisant la biodiversité et la cohabitation entre hommes et nature, et des projets participatifs favorisant le développement local et le tissu social.
Nous avons des solutions à vous proposer
Car ce que la crise liée à la covid 19 nous a appris, c’est qu’il est plus que temps d’agir pour modifier nos modes de vie. En tant qu’architectes, urbanistes et paysagistes, nous sommes persuadés que cette transformation passe par l’espace. Il nous faut repenser nos manières d’habiter, de travailler, d’apprendre, de fabriquer, de consommer et de créer du lien, tout en le faisant dans le respect et l’attention portés à notre environnement.